LA FRANC-MACONNERIE ET LES M0YENS POUR ARRÊTER SES RAVAGES (2)
CHAPITRE V
Le mensonge et l'hypocrisie, moyens habituellement
employés par la Franc-Maçonnerie.
Le franc-maçon Louis Blanc résume ainsi le
but et le plan de la Franc-Maçonnerie : « Par le
seul attrait du mystère, par la seule puissance de
l'association, soumettre aune volonté et animer
d'un même souffle des milliers d'hommes, pris
dans chaque contrée du monde, mais d'abord en
"Allemagne et en France; faire de ces hommes, "
au moyen d'une éducation lente et graduée, des
"êtres entièrement nouveaux; les rendre obéissants "
jusqu'au délire, jusqu'à la mort, à des chefs invi-
"sibles et ignorés; avec une légion pareille peser "
secrètement sur les cœurs, envelopper les souve-
rains, diriger, à leur insu, les gouvernements et
mener l'Europe à ce point que toute superstition
fût anéantie, toute monarchie abattue, tout privi-
lège de naissance déclaré injuste, le droit même
"de propriété aboli; tel fut le plan gigantesque du "
fondateur de Filluminisme, Weishaupt \ »
1. Histoire de la Révolution.
Un pareil dessein étant de nature à révolter
toute conscience honnête, il y avait, pour la Franc-
Maçonnerie, un intérêt capital à le tenir caché.
l)de là ces affirmations réitérées « que la Franc-
Maçonnerie ne s'occupe pas de religion, ni de
"politique ; qu'elle respecte les opinions de chacun "
de ses membres ainsi que les diverses formes de
"gouvernement; que, placée dans les sphères hau-"
tes et sereines d'une philosophie généreuse, dont
le dernier mot est l'amour de l'humanité, elle
juge indigne d'elle de descendre dans la lutte des
"partis ; qu'au nom de la liberté de conscience, qui "
est sa devise, elle respecte la religion de chacun
de ses membres, et que les discussions religieuses
sont rigoureusement interdites dans les Loges. »
Certes, si Satan avait dit à Eve : Oui, c esterai, si
vous mangez du fruit défendu, vous mourrez de
mort, notre première mère eut vraisemblablement
reculé d'épouvante, et l'humanité eût été sauvée.
Mais Satan ne recule pas, lui, devant le plus im-
"pudent mensonge, loin de là; le mensonge est "
sa nourriture et sa vie, et il ment hardiment,
ajoutant le blasphème au mensonge. Sachant
qu'il n'est pas possible de persuader à Eve qu'il
if y a pas de défense de la part de Dieu, puisque
la défense a été faite immédiatement par Dieu
lui-même à nos premiers parents, il pousse l'au-
dace sacrilège jusqu'à mettre dans le cueur de
Dieu une basse envie à l'égard de sa créature.
Point du tout, repart-il, vous ne mourrez pas de
f
mort. Car Dieu sait quen quelque jour que ce soit
"que vous en mangiez, vos yeux s’ouvriront; et vous "
serez comme des dieux, sachant le bien et le mal.
Aveuglée par l'orgueil, Eve ne s'aperçoit pas
"même de l'exécrable blasphème; tout entière "
sous l'attrait du fruit qu'elle convoite, elle roule
dans l'abîme du péché. Cette tactique qui lui a si
bien réussi dès le début, Satan l'emploie envers
tous les malheureux enfants d'Eve, mais il l'em-
ploie avec un succès prodigieux dans la Franc-
Maçonnerie.
Le franc-maçon Voltaire disait a ses frères :
« Mentez, mes amis. Il faut mentir comme un
diable, non pas timidement, non pour un temps,
mais hardiment et toujours. Le mensonge n'est
un vice que quand il fait du mal. » Pour tranquil-
liser la conscience de ses adeptes, la Franc-Maçon-
nerie n'a pas reculé devant les plus infâmes calom-
nies, et elle est allée jusqu'à leur affirmer qu'elle
comptait au nombre de ses membres des person-
nages que cependant elle abhorrait. Pour n'en
citer que quelques exemples : n'a-t-elle pas essayé
de leur faire croire que le grand pape Benoît XIV
était franc-maçon, et qu'il n'avait pas maintenu
l'excommunication portée par Clément XII contre
les membres delaFranc-Maçonnerie? La calomnie
eut du succès, au point d'obliger Benoît XIV h
y
publier la constitution Providas ?omanorum, où il
frappe l'abominable Secte de toutes les foudres de
l'Église, afin de détromper les simples, déformer
la Louche à la calomnie, et d'empêcher la per-
version des âmes *. N'a-t-ellc pas affirmé, avec
une persévérante opiniâtreté, que le grand pape
Pie IX était franc-maçon? lui qui a renouvelé
contre la Franc-Maçonnerie toutes les censures
portées par ses prédécesseurs, et l'a tant de fois
dénoncée aux princes, aux fidèles et à tout l'uni-
vers! Ne î'a-t-on pas vue, en 187o, soutenir cette
imposture devant le tribunal de Lyon, par l'or-
gane d'un membre du conseil de l'ordre du Grand-
Orient, et essayer de démontrer son affirmation,
en produisant des photographies où les insignes
maçonniques étaient étalés sur les ornements pon-
tificaux, comme si le Pape se fut rendu dans les
Loges avec l'appareil des solennités pontificales !
Pie IX franc-maçon! lui, qui n'a cessé de combat
Ire la Secte et de s'attirer toute sa haine! lui,
dont les cendres terrifient encore la Franc-Maçon-
nerie et allument sa rage! N'a-t-elle pas affirmé
à ses dupes, que les fils de saint Dominique, les
pieux et savants Frères Prêcheurs appartenaient à
sa coufrérie? Eux, que les francs-maçons de la
Commune ont tués comme des bêtes fauves dans
la rue Haxo! eux, que la Franc-Maçonnerie ar- a
rachés avec violence de leurs maisons et jetés
sur le pavé des rues!
Dans la campagne qu'elle entreprise contre le
1. Quant à l'accusation d'Être franc-maçon, la grande âme
de Brunît XIV l'aurait laissée courir, si elle n'avait iMé de nature
à porter un grand préjudice à l'Église et aux fidèles : Si qnœ
clergé, les congrégations et l'enseignement chré-
tien, elle emploie l'équivoque, l'hypocrisie, le
travestissement de la vérité, le mensonge, la
calomnie, elle emploie tout. Elle fait mentir l'his-
toire, mentir les monuments, mentir la science,
mentir la poésie, mentir la peinture, elle fait tout
"mentir; c'est la conspiration du mensonge uni-"
versel contre la charité, la justice et la vérité.
Dans un manuel de ?no?*ale civique, répandu à
profusion dans les écoles publiques, un franc-
maçon célèbre, M. Paul Bert, abaisse, avilit et
voue au mépris et à la haine de la jeunesse la
France d'avant 1789. Jusqu'alors, les ténèbres
enveloppèrent la France, et la tyrannie sous tou-
tes ses formes écrasait le pauvre peuple. Clovis,
Charlemagne et tous les personnages qui ont fait
de la France le plus beau royaume après celui du
ciel, sont représentés, dans ce manuel, avec les
traits les plus hideux. Avant 1789, régnaient,
parmi les grands et les puissants, le vol, le brigan-
dage et la paresse, et, parmi le peuple, l'extrême
misère et la plus lourde oppression. Tous les
priuces étaient des voleurs, tous les guerriers,
des pillards, et tous les moines, des fainéants, qui
laissaient aux paysans juste de quoi ne pas mou-
rir de faim. Par contre, les Albigeois, qui ont
mis à feu et sang le midi de la France, avaient h
autem contraria de Nobis opinio circumferretur, Nos eaai se-
curi contemnere possemus, causamque Nostram justo Dei
omnipotenlis judicio reliuquere. » Provicias Romanorum.
une bonne religion , et ils furent les victimes
des papes infaillibles, de Dominique, inventeur
de l'Inquisition, et d'autres fanatiques, aventuriers
et bandits. C 'est à cette occasion, dit le Manuel,
« que lurent imaginées plusieurs monstrueuses
inventions qui ont fait tant de mal à la religion
catholique, l'Inquisition, le célibat des prêtres et
la confession, créés uniquement dans un but de
politique et do domination. » Tout cela estembelli
d'images où Ton voit les paysans encore sauvages
apporter leurs grasses volailles pour alimenter les
festins dos moines et des grands, tandis qu'eux
sont réduits à manger des rats. C 'est ainsi que la
Franc-Maçonnerie écrit l'histoire pour les enfants,
qu 'elle entend enlever do force h leurs parents,
et pétrir de préjugés et d'erreurs, afin de pouvoir
les façonner à son image et ressemblance.
Au mensonge la Franc-Maçonnerie n'hésite pas
à joindre l'hypocrisie, et, quand le besoin delà
cause l'exige, elle sait s'affubler de la peau de
brebis pour cacher ses projets homicides-. « Les
2)
sociétés secrètes, disait le pape Pie VII , répan-
dues en Italie et dans les autres pays, bien que
divisées en plusieurs sectes ayant des noms dis-
tincts, ne forment néanmoins en réalité qu'une
société, étant unies parla communion des mêmes
1. Snns doute, la religion dus Albigeois était bonne pour
Al. Paul liert, puisqu'elle n'était, en substance, que la religion
di:s francs-maçons, dont les Albigeois, après les Manichéens,
sont les ancétres les plus insignes.
2. Constitution Ecclfsiam Jasa.
doctrines et des mêmes crimes et par une étroite
alliance. Ses membres simulent, à la vérité, un
respect singulier et un zèle admirable pour la re-
ligion catholique et pour la personne et la doc-
trine de Jésus-Christ, notre Sauveur, qu'ils ont
la criminelle audace d'appeler quelquefois leur
recteur et leur grand maître. Mais ces discours,
qui paraissent avoir plus de douceur que l'huile,
ne sont autre chose que des traits qu'emploient,
pour blesser plus sûrement les imprudents, des
hommes fourbes, qui viennent sous des vêtements
de brebis, tandis qu'au dedans ce sont des loups
ravisseurs. Weishaupt, dansles » Statuts de l'ordre,
a tracé cette règle de conduite aux membres de la
Secte : « Vous regarderez comme un principe
constant parmi vous que la franchise n'est une
"vertu qu'auprès des supérieurs ; appliquez-vous "
à l'art de vous contrefaire, de vous cacher, de
vous masquer, en observant les autres pour pé-
nétrer dans leur intérieur. » Tout, dans la Maçon-
nerie, est employé à tromper et à faire des dupes,
tout, jusqu'aux emblèmes, qu'elle emprunte, au
besoin, au christianisme, quand il faut tromper
les initiés qui ne sont pas assez avancés pour l'ab-
horrer. Yoici l'aveu d'un franc-maçon : « Le
vulgaire est le plus souvent croyant, mais igno-
"rant; ainsi, de même qu'il serait inutile de lui "
parler des formules des sciences qu'il ignore, il
serait également très dangereux d'user avec lui
des signes d'impiété et d'irréligion. Le néophyte
s'épouvanterait et s'irriterait. Au contraire, il
demeure enchanté d'admirer, en entrant dans la
Charbonnorie, les symboles chrétiens : et, sans
faire attention à autre chose, il jure fidélité. C'est
ensuite l'affaire des théologiens du convcnticule
à l'examiner, une fois admis, et à se servir de
lui, d'une manière ou d'une autre, suivant ses
dispositions. Us commencent parle décatholici-
"ser; api es, ils lui démontrent que toute révélation "
"est ridicule; puis ils attaquent la religion natu-"
relle, en faisant disparaître de l'esprit toute idée
de peine et de récompense future. Us le disposent
avec ail ii l'insubordination, et le conduisent fina-
lement au régicide, sous le prétexte de venger,
d'abord la mort du Christ, ensuite, les droits
politiques des hommes foulés aux pieds »
Procédant avec toute la prudence du serpent
antique, la Franc-Maçonnerie sait parfaitement
prendre, les couleurs et les airs qu'exigent le
caractère, les mœurs et les idées de chaque
nation et de chaque époque. Ainsi son caractère
anti-religieux et anti-national est beaucoup moins
accentué en Angleterre, aux Etats-Unis et au
Brésil, que sur le continent européen. Là, la
grande majorité des membres ne voient dans la
Franc-Maçonnerie qu'une société philanthropique
de secours mutuels et de réunions amicales. Le
tempérament de la race anglo-saxonne est trop
1. Pi/far i tli Montagna, Facnza, 1822, Extrait de la Civiltù
Cattolica, 1879, u. 703, pag. 98.
froid et trop positif, et, chez elle, l'amour de
l'ordre et le respect de l'autorité ont encore de
trop profondes racines, pour que la Franc-Maçon-
nerie y dévoile le but final qu'elle poursuit, et
étale aux regards de tous les frères les différents
articles de son programme. Là, elle conserve
habilement, dans son programme, la croyance
en Dieu et à l'immortalité de l'âme, et il paraît
que les esprits ne sont pas encore préparés et
mûris pour faire une guerre acharnée à l'Eglise
catholique. Aussi la famille anglo-saxonne, con-
voquée comme les autres à prendre part au con-
grès maçonnique universel qui doit se tenir à
Rome, cette année, pour porter les derniers coups
à l'Eglise catholique, refuse de s'y rendre. Le
journal le Freemason, de Londres, dit à ce sujet :
« Les francs-maçons italiens croient avoir à
résoudre doux grandes questions : 1° Ce qu'ils
"appellent la question sociale ; 2° la puissance, les "
persécutions et la présence de l'Eglise catholique
romaine. Mais ce sont là des questions qui
échappent entièrement à notre compétence, à
nous francs-maçons, et pour lesquelles ils ne
"peuvent trouver d'aide qu'en eux-mêmes; ce "
sont d'ailleurs des sujets que les maçons anglo-
saxons refuseraient nettement de discuter. De
telles questions n'ont rien à voir avec la Franc-
Maçonnerie, à laquelle elles sont complètement
étrangères, et elles ne pourraient être acceptées,
même un moment, par aucun maçon anglo-saxon.
De sorte que si ce congrès maçonnique universel
a lieu, il devra se réunir sans la coopération de
1)
la famille anglo-saxonne . »
Néanmoins cette Franc-Maçonnerie est mau-
vaise, et c'est à bon droit que l'Eglise l'a enve-
loppée avec les autres dans un commun ana-
"thèmc ; car elle est de ces choses dont la meil-"
leure est encore mauvaise. Si tous ses membres
ne se prêtent pas à l'exécution des projets de
la Maçonnerie occulte, il s'en trouve néanmoins
toujours qui se font volontiers ses instruments
dociles et complaisants, et qu'elle emploie avec
un grand succès. Pour n'en citer qu'un exemple,
c'est grâce à la Franc-Maçonnerie que l'Angle-
terre a prêté son concours à un homme qui a
été l'incarnation de Satan. Au mois d'avril 1864,
Garibaldi, reçu pompeusement à Londres par
les ministres, les membres de la chambre des
lords et trente mille spectateurs, fit cette décla-
ration : « Naples serait encore aux Bourbons,
"sans l'aide de Palmcrston; et, sans la flotte "
anglaise, je n'aurais jamais pu franchir le détroit
de Messine. » Palmcrston, qui était le chef du
ministère anglais, au moment de l'expédition de
Garibaldi, était aussi le chef de la Maçonnerie
anglaise. Peu importe à la Maçonnerie qu'elle
fasse marcher l'armée ou la flotte d'une nation
par l'impulsion des Loges, ou que toutes les forces
1.) Cité par le Monde du 22 février 1882.
de cette nation servent à sa cause, en vertu de
"la politique et des ordres de l'un de ses membres; "
le résultat est le même. L'essentiel, le tout est
que les forces d'un peuple soient à sa disposi-
tion pour exécuter ses projets. D'ailleurs, si inof-
fensif que puisse paraître l'esprit maçonnique,
tel qu'on l'enveloppe dans les Loges anglaises et
américaines, avec le temps il ruine les tempéra-
ments les plus robustes, et finit par causer les
"effets les plus délétères ; car il est un de ces poi-"
sons violents et subtils qui traversent les parois
du vase et dont les émanations corrompent l'air.
D'ailleurs, si l'Eglise catholique continue ses con-
quêtes en Angleterre, la Franc-Maçonnerie ne
manquera pas d'entrer contre elle dans une voie
plus agressive. Nous le verrons bientôt, l'ennemi
de la Franc-Maçonnerie est, avant tout et par-
"dessus tout, l'Eglise catholique; et comme, "
depuis deux cents ans, la violence de la persécu-
tion avait presque détruit l'Église catholique en
Angleterre et dans ses colonies, la Franc-Maçon-
nerie a tourné sa fureur ailleurs. Néanmoins là
"encore elle n'a pas désarmé; c'est elle qui a fait "
pénétrer dans la législation de l'Angleterre et des
Etats-Unis la séparation de la religion et de l'édu-
"cation c'est elle qui, à plusieurs reprises, a essayé ;"
de réveiller dans la grande République le fanatisme
protestant contre les catholiques.
Jusqu'à ces dernières années, la Franc-Maçon-
nerie française avait retenu dans son symbole la
croyance l'Architecte de l'univers et à l'immorta- à
lité do l'âme, laissant entendre à ceux qu'elle
voulait tromper, que, sous ce nom d'Architecte,
il s'agissait de Dieu. Mais, au fond, elle était ma-
térialiste et athée, elle laissait à chaque franc-
maçon la liberté d'entendre ce qu'il voulait par
Architecte de l'univers. Aussi, tandis que les uns
voyaient, dans l'Architecte, le vrai Dieu, créateur
du monde, d'autres entendaient, sous ce nom, la
"nature ; d'autres, la matière éternelle; d'autres le "
"hasard; d'autres, le diable. Ulysse Bacci, l'un "
des chefs de la Maçonnerie italienne, disait, il y
a quelques aimées, qu'il n'y arien de plus ridi-
cule et de plus pernicieux que de faire du bruit
et de jeter la discorde dans le camp maçonnique
par la question de savoir s'il on doit conserver
ou détruire une formule si inoffensive qui s'adapte
à toutes les opinions, même à celles des plus
grands athées, des plus profonds matérialistes
et des libres-penseurs.
Mais ce masque d'hypocrisie faisait souffrir la
Maçonnerie, et elle n'attendait, pour le jeter, que
des circonstances favorables. En 1866, à Leipsick,
elle ht la déclaration suivante par la bouche de
l'un de ses membres : « Je suis fermement con-
vaincu que le temps doit arriver et arrivera, où
l'athéisme sera l'opinion générale de l'humanité
entière, et où cette dernière considérera le déisme
comme, une phase passée, tout comme les francs-
maçons déistes sont au-dessus des divisions reli-
gieuses. Il ne faut pas seulement nous placer
au-dessus des différentes religions, mais au-des-
sus de toute croyance en un Dieu quelconque. »
Cette profession de foi d'athéisme passa bien vite
des Loges allemandes dans les Loges françaises.
En 1869, celles de la région de l'Est se réuni-
rent à Metz, et les membres présents décidèrent
à l'unanimité que l'existence de Dieu et l'immor-
talité de l'Ame seraient effacées de la constitution
maçonnique, et remplacées par la solidarité hu-
maine. La même année et le même mois, l'Inter-
nationale allemande, française et suisse rédigea
le programme de l'Alliance internationale démo-
cratique, qui fut ensuite approuvé par le Conseil
général de Londres. L'article premier de ce pro-
gramme, qui est comme la base de l'Alliance, est
ainsi conçu. « L'Alliance se déclare athée: elle
veut l'abolition des cultes, la substitution de la
science à la foi, etdc lajustice humaine àla justice
divine. »
Ces déclarations et d'autres, qu'il serait trop
long de citer, furent comme une traînée de pou-
dre qui alluma dans toutes les Loges le feu de la
"guerre à Dieu; et, le 14 septembre 1877, les délé-"
gués delà Maçonnerie française réunis à Paris effa-
cèrent de l'article premier de la conslitutionmaçon-
nique la croyance explicite à l'existence de Dieu
et à l'immortalité de l'âme, jugeant que le voile
trompeur n'avait plus sa raison d'être. Dès ce
moment, la Maçonnerie française fait à Dieu une
guerre implacable, pour se substituer partout à
lui. Toutefois, là encore elle fait largement usage
du mensonge et de l'hypocrisie.
L'entreprise est trop satanique, pour en avouer
"ouvertement le but; elle révolterait toute àme "
qui n'a pas éteint en elle les derniers sentiments
de la rectitude naturelle. Donc à cette entreprise,
il lui faut aussi son masque, et ce masque, c'est
"la laïcisation; et lalaïcisation elle-même est encore "
abritée sous certains droits prétendus de l'État.
Car la Maçonnerie, quand elle est au pouvoir, est
convaincue que F Etat, c'est Elle, Si elle noie dit
pas toujours ouvertement, elle ne manque pas
de le faire sentir à ceux qui ne combattent pas sous
son drapeau. Ouand la Franc-Maçonnerie est de-
venue l'Etat, l'Etat ne reconnaît rien au-dessus de
lui ; il n'a pas d'autres règles de justice que son
"bon plaisir tyrannique et l'étendue de sa force; il "
crée, le droit, et, en dehors de celui qu'il accorde
au citoyen, il n'en existe pas. Les actions sont
bonnes ou mauvaises, non en vertu de leur con-
formité ou difformité avec des règles objectives,
éternelles et immuables, mais uniquement en
vertu de la loi de l'Etat. Une action n'est bonne
que parce qu'elle est ordonnée, et elle n'est mau-
vaise que parce qu'elle est défendue. Si donc la
loi de l'Etal ordonne au père de livrer son fils à
l'État et de le lui sacrifier, le père, en immolant
son (ils si l'Elal. fera une action aussi louable et
aussi méritoire que le sacrifice d'Abraham. Si l'Etat
ordonne de chasser de leur domicile tels ou tels ci-
toyens, telle ou telle catégorie de personnes, deles
jeter brutalement àla rue, s'ils ne s'empressent
pas d'obéir au Dieu-État, et de s'emparer de
leurs biens, ce sera une bonne action, un brillant
exploit, digne des plus grands honneurs et des
plus grandes récompenses. La Maçonnerie accorde
au Dieu-Klat, — toujours ça va sans dire, quand
elle est l'Etat, — ce que la philosophie et la théo-
logie ne peuvent reconnaître dans le Dieu vrai et
"infini; car la saine raison proclame avec la foi que "
la distinction du bien et du mal ne dépend pas de
la libre volonté de Dieu, mais repose sur les es-
sences elles-mêmes des choses, essences que Dieu
ne peut pas plus changer que sa propre nature.
Telles sont les conséquences atroces de l'a-
théisme, contre lesquelles proteste la conscience
indignée,^mais qui sont rigoureuses : on ne peut
y échapper qu'en reniant le principe Dieu-Etat,
"ou en faisant violence à la logique; or la Franc-"
Maçonnerie ne permet ni l'un ni l'autre à ses
adeptes.
4.)